"L'Autre Maison", c'est ainsi que Fiona la nommait.
"Maman, nous pourrions aller dans l'autre maison ce week-end" tapait elle des fois sur son clavier.
Fontarèches, cette Autre Maison, le seul lieu qu'il me reste d'elle. Je la sens ici. Parfois elle me parle, comme hier soir. Ou bien elle m'envoie quelques signes.
Je m'y sens bien, loin du monde me semble t-il, en paix avec moi même, face à moi-même.
J'ai rangé quelques affaires de Fiona qui étaient dans des cartons. J'ai retrouvé son "Carnet secret des filles" que nous avions commencé ensemble à remplir.
Elle devait y noter qui elle était, ses signes particuliers (elle avait indiqué : jolie, forte, très (trop) moi !),
ce qu'elle préférait chez elle (ses yeux, ses cheveux),
à qui elle ressemblait (Pierre...:)),
ses qualités (joie)...
Nous en étions restées là.
Nous n'avons pas eu le temps d'aller plus loin...et puis ses vrais secrets, ce n'est pas à moi qu'elle les aurait racontés.
Par contre, à la page "je déteste", elle avait répondu :
"Je déteste lorsque les gens me parlent comme à un bébé, lorsque les gens se disputent, lorsque j'essaye d'exprimer quelque chose et que personne ne me comprend".
Dans ce cahier, j'ai retrouvé un petit mot qu'elle avait écrit avec Julie, une de ses éduc suite au "départ" de deux de ses camarades (j'étais alors en déplacement à Lyon pour le salon du Handicap) :
"Je suis triste pour Fayfun et Sonia. J'ai peur de mourir. Pourquoi je n'arrive pas à pleurer. Je voudrais mais je n'y arrive pas. Maman part au mauvais moment. J'ai besoin d'elle, je ne veux pas qu'elle meurt. La vie est injuste, il faut pourtant faire avec."
Voilà, j'ai refermé son "Carnet secret des filles" et je l'ai déposé sur une étagère d'un placard de "l'Autre Maison".